Peut-être êtes-vous en train d'esquisser un froncement de sourcils à la lecture de ce titre, car vous vous attendez à vous « coltiner » un tas de chiffres et de lettres. N'ayez crainte chers lecteurs, cet article se veut ludique pour vous aider à comprendre l'essentiel. Nous ferons un rapide saut dans l'histoire pour retracer l'évolution du poinçon de jurande au poinçon de garantie, aujourd'hui utilisé par les douanes françaises. Puis nous verrons les spécificités du poinçon de maître, avant de nous intéresser plus en détail aux poinçons or, argent et platine français actuels.
Note : Le document de garantie pour les métaux précieux édité par le bureau des douanes vous est fourni en fin d'article pour vous aider à vous repérer.
Le poinçon : définition
Un poinçon est une marque apposée sur un bijou ou une pièce d'orfèvrerie pour en contrôler le titre, c'est-à-dire la proportion de métal pur que contient son alliage. Il convient de rappeler ici que l'or, l'argent et le platine sont les trois seuls métaux précieux qui existent. Cependant, ils sont bien trop mous à l'état pur et doivent obligatoirement être alliés à d'autres métaux afin d'être utilisables en bijouterie, joaillerie et orfèvrerie.
Par conséquent, si un alliage comprend 75 % d'or pur, comme un titre est toujours indiqué en millième, on fera référence à cet alliage en tant qu'or 750 / 1 000 ou 750 ‰. À chaque titre correspond un poinçon officiel, qui permet d'identifier en un coup d'œil à la fois le type de métal pur utilisé et sa quantité exacte dans l'alliage.
Depuis l'Ancien Régime, l'or est titré de façon spéciale via le système des carats (l'argent, lui, était titré en deniers et en grains). Les abréviations couramment utilisées pour faire référence aux carats sont « ct », « k » ou encore « kt ». Un carat représente 1/24 de la masse totale d'un alliage. Ainsi, de l'or 18 carats signifie que sur les 24 parts d'un alliage, on trouve 18 parts d'or pur.
Voici un tableau des équivalences entre les titres au millième et les carats :
➡ Vous pouvez consulter cet article pour mieux comprendre les alliages de métaux précieux en bijouterie
Brève histoire des poinçons de bijouterie et d'orfèvrerie en France
Du poinçon de jurande au poinçon de garantie
Les premiers documents historiques relatifs à la corporation des orfèvres datent de 1268. Ils sont l'œuvre du prévôt de Paris Étienne Boileau qui, sur ordre de Louis IX, s'était attelé à codifier les statuts de cette corporation. Leur siège portait alors les noms de maison commune, communauté ou encore jurande.
Afin de garantir le titre d'un métal, Philippe III le Hardi ordonna en 1275 qu'un poinçon de jurande, propre à chaque communauté d'orfèvre, soit apposé sur les ouvrages en argent. Son successeur Philippe IV le Bel étenda l'usage de la marque aux ouvrages en or à partir de 1313.
Parallèlement à cette réglementation corporative, appliquée via le poinçon de jurande, Colbert instaura un système d'imposition. Ainsi, des poinçons de charge et de décharge, aussi appelés les poinçons de la marque ont permis la collecte d'impôts en application du « droit de marque et de contrôle ».
Les jurandes et associations d'orfèvres furent abolies dans le sillon de la Révolution ; et en avril 1791, les impôts indirects, supprimés. En conséquence, l'État enregistra de lourdes pertes fiscales. On assista également à une prolifération des fraudes liées à l'absence de contrôle sur les titres des métaux. C'est donc à la hâte que fut promulguée la loi du 19 brumaire an VI (équivalent au 9 novembre 1797 dans le calendrier grégorien).
La loi du 19 brumaire mit un terme aux poinçons de jurande et poinçons de la marque. Cependant, elle établit les bases juridiques de la Garantie, sur lesquelles s'appuient encore aujourd'hui les douanes françaises. De nos jours, lorsqu'un bijou fait à base d'un métal précieux est créé, il est d'abord insculpé du poinçon de maître, puis envoyé aux douanes qui l'insculpent à leur tour d'un poinçon de garantie, permettant ainsi de certifier le titre de l'alliage.
Le poinçon de maître
Le poinçon de maître, aussi appelé poinçon de fabriquant, est la signature de l'artisan qui a réalisé un bijou ou une pièce d'orfèvrerie. Il fournit ainsi des éléments de renseignement sur la provenance d'un bijou. Le poinçon de maître doit avoir une forme losangique et horizontale, mais des variantes verticales existent également. Au centre du losange se trouve un symbole, autour duquel sont inscrites les initiales du maître orfèvre ou joaillier.
Ce poinçon est devenu obligatoire à partir du Moyen Âge et devait être insculpé à côté du poinçon de jurande. En province, les orfèvres pouvaient choisir comme symbole les éléments héraldiques de leur ville ou de leur province. C'est pourquoi sur les poinçons des maîtres d'Angers on voit apparaître des clefs, des hermines chez ceux de Bretagne, ou encore des lettres ou des abrégés comme S pour Saumur ou MOP pour Montpellier. En 1378 à Paris, le symbole central devait être surmonté d'une fleur de lys ; remplacée en 1506 par deux points nommés grains de remèdes.
Voici mon poinçon. J'ai préféré vous montrer un dessin car le poinçon lui-même est trop petit pour être bien visible en photo :
Les poinçons de l'or
Ils sont obligatoires sur les pièces en or qui pèsent plus de 3 grammes.
Selon la quantité d'or pur présente dans un alliage, un bijou sera titré comme suit :
or 24 carats ou 999 millièmes : hippocampe (sur les lingots et ouvrages neufs)
or 22 carats - 1er titre - 916 millièmes : tête d’aigle
or 20 carats - 2e titre - 840 millièmes : ce poinçon n'est plus en vigueur depuis 1994
or 18 carats - 3e titre - 750 millièmes : tête d’aigle
or 14 carats ou 585 millièmes : coquille Saint-Jacques
or 9 carats ou 375 millièmes : trèfle
Les poinçons de l'argent
Selon la quantité d'argent pur présente dans un alliage, un bijou sera titré comme suit :
argent 999 millièmes : amphore (sur les lingots et les ouvrages neufs)
argent 925 millièmes - 1er titre : tête de Minerve (souvent appelé argent sterling)
argent 800 millièmes - 2e titre : tête de Minerve ; ou cygne pour les objets d’occasion, importés ou à l’origine inconnue
N.B. : Il n'existe pas de poinçon de 3e titre argent en France.
À partir de 1973, le poinçon Minerve de 1er titre est passé de 950 à 925 ‰. Par la suite, et pour mieux situer dans le temps l'insculpation d'un poinçon argent, des décennies ont été définies par une lettre :
A : 1973 - 1982
B : 1983 - 1992
C : 1993 - 2002
D : 2003 - 2012
E : 2013 - 2022
Les poinçons du platine
Selon la quantité de platine pur présente dans un alliage, les titres sont les suivants :
platine 999 millièmes : manchot (sur les lingots et les ouvrages neufs)
platine 950 millièmes - 1er titre : tête de chien
platine 900 millièmes - 2e titre : tête de chien
platine 850 millièmes - 3e titre : tête de chien
Le listel et le contour d'un poinçon
Un poinçon est délimité par une bordure. Soit elle suit les contours du symbole central, le cas échéant cette ligne s'appelle un listel ; soit un poinçon s'inscrit dans une forme géométrique, dans ce cas on parle de contour. Les différentes formes de contours permettent de distinguer plus rapidement si un titre est de 1er, 2e ou 3e titre.
Où trouver un poinçon sur un bijou ?
Un poinçon ne sera pas placé au même endroit selon les bijoux. Pour l'anneau d'une bague, on le trouvera le plus souvent sur les faces intérieures et/ou extérieures. Pour un collier ou un bracelet, il y a fort à parier qu'il se trouve près du fermoir. Et enfin pour les montres, il se trouve généralement sous le boîtier.
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Sources :
Collectif, CERVAL Marguerite. Poinçons des métaux précieux (or, argent, platine). Le dictionnaire international du bijou, éditions Le regard, 1998
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